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Légumes bio : pour en finir avec la corvée de binage

Dans cette ferme familiale maraîchère conduite en bio, binages mécaniques et désherbages manuels prennent un temps fou. Mais depuis peu, Cédric Chapeau teste un robot qui serait capable de prendre en main à «lui» seul cette corvée.

 

A Longué-Jumelles, dans la famille Chapeau, on est maraîcher bio de père en fils, et en fille. Songez, l’aventure a démarré il y a plus de trente-cinq ans. Quand Jean-Luc s’installe et plante ses premiers légumes bio en 1979, la ferme, fondée jadis par le grand-père, produit encore du lait. Vingt ans plus tard, son fils Cédric le rejoint puis, en 2008, sa fille Céline. Entre temps, les vaches laitières puis  les allaitantes ont disparu. Le légume est devenu l’unique occupation. Et quelle occupation!

 

 

IMG_4016 copieCôté travail, « cela devient très chaud » explique Cédric. En cette fin de printemps, c’est la période creuse: «On n’a que vingt-cinq légumes. » Cela représente déjà beaucoup de boulot pour lui et son père dans les parcelles, et pour Céline qui se charge du commerce. «Nous récoltons tous les jours et nous livrons immédiatement pour garantir la fraicheur.» Avec l’été, la grosse vague reste à venir.

 

La ferme produit pas moins de cent vingt légumes différents sur l’année, à récolter et à planter : «La salade, on en plante tous les quinze jours.» Depuis l’installation de Céline, les débouchés ont été totalement revus. « Avant, nous vendions à un grossiste. Nous avions peu de variété de légumes.»

 

Après la création d’une « amap» à Longué, tout cela a été revu. Aujourd’hui, la totalité ou presque est écoulée en direct via deux « amap », deux magasins, des paniers pour les comités d’entreprises et la vente à la ferme vendredi et samedi. «Depuis peu, nous retravaillons à nouveau avec Rungis  via un transporteur.»

 

 

 

 

Pour garantir de la variété dans les paniers, la diversité des productions a explosé.Dans le même temps, la surface cultivée  en légumes s’est agrandie, y compris sous abris. « Avec onze hectares en plein champ, on est au maximum ou presque » estime Cédric.  La priorité à venir sera d’augmenter les abris où les maraichers sont contraints, faute d’espace, de serrer les inter-rangs à cinquante centimètres. La couverture sert avant tout à sécuriser les tomates l’été face aux maladies, ainsi que les salades l’hiver.

 

Binage chronophage

Davantage de légumes, de surface, de clients à servir, la seule chose qui n’ait point augmenté ces dernières années est la main d’oeuvre. Depuis qu’ils n’ont plus de salarié permanent, la soupape, ce sont les temporaires. « Nous embauchons des saisonniers selon les besoins. Ils ne sont jamais plus de quatre en même temps.» Tout l’été, cette main d’oeuvre d’appoint est affectée au désherbage manuel, à la main ou à la binette. «L’an dernier à quatre, ils n’ont fait que cela de la mi-juin à la fin août.»

 

Ce travail manuel, effectué une seule fois par culture, est juste un complément ! « Nous passons la bineuse dans toutes les parcelles. Quand l’herbe est petite, cela va car nous arrivons à couvrir de terre les adventices sur le rang. Mais dès que l’on est en retard, on n’y arrive plus. » C’est alors la main qui prend le relais.

 

Chaque été, une course s’engage pour suivre la levée des mauvaises herbes. « Il nous faut trois jours pour passer partout avec la bineuse. Nous devons revenir tous les dix à douze jours.» Tout cela prend beaucoup de temps et mobilise les deux hommes du gaec: «L’un comme chauffeur, l’autre pour guider la bineuse afin de passer au plus près des plants. »

 

Ce travail demande un temps favorable: «Il faut biner au soleil pour éviter que les herbes ne repartent. Et pour le stade, c’est au jour près quand il fait chaud et que cela pousse. » Certaines cultures dont l’installation est lente comme la carotte demandent plus de disponibilité encore. C’est là que le bât blesse: «On n’arrive plus à se libérer six ou huit heures tous les deux pour faire le binage. On en vient à faire cela le dimanche car il y a peu de récoltes à faire ce jour-là.» 

 

IMG_3988 copieQuatre mini-roues motrices, un look de rover martien, haut comme trois choux et trapu, lent mais têtu à la tâche, un étrange visiteur a voilà peu fait irruption dans le quotidien de la ferme. « Je ne savais même pas que cela existait » avoue Cédric.

 

Ce robot, conçu et fabriqué en France par la société Naïo Technologies, serait capable de biner et de manoeuvrer seul parmi les rangs de légumes, sans intervention humaine autre que de le déposer dans la parcelle. Lorsque Frédéric Lacoste de Ného a proposé de tester la «bête» chez lui pendant quelques mois, le maraicher reconnaît qu’il était sceptique. 

 

La perspective de « gagner du temps » suffit néanmoins à le convaincre de tenter l’expérience. Le robot est testé simultanément sur deux sites maraichers. Cédric en dispose pour quelques journées tous les huit ou dix jours. Très vite il apprend à le commander à l’aide d’une télécommande en tous points semblable à celles des jeux vidéo. Une petite console à l’arrière de l’engin permet d’entrer quelques données de « repérage » comme la longueur approximative des rangs. «C’est très facile à utiliser», dit-il en conduisant son étrange acolyte jusqu’à un champ de haricots verts.

 

Des socs et des peignes

En cette mi-mai, c’est la deuxième fois seulement qu’il le met à l’épreuve. « Je l’ai eu la première fois il y a un mois, mais depuis il a plu chaque fois que je l’ai récupéré! » Vu l’écartement très resserré des rangs, un test sous abri n’était guère possible. Quoiqu’il en soit, le premier essai a été très concluant. «Je l’avais mis dans une parcelle de fèves.» Méfiant, Cédric n’a point quitté l’appareil des yeux : « Je me demandais s’il allait reconnaître les rangées. Quand j’ai vu que cela marchait, je l’ai laissé seul et je suis allé faire autre chose.

 

 

IMG_3978 copiePour biner la parcelle d’un demi hectare, le robot a mis six heures. «J’ai dû changer ses batteries au bout de trois heures.» Finalement, l’engin a fait du bon travail, «aussi bien qu’avec le tracteur ». Et sans dégâts.

 

Mais avec ses petites roues et la bineuse miniature qui ne prend qu’un rang à la fois, il s’est révélé trois à quatre fois plus lent. «Biner cette parcelle nous demande une heure trente à deux heures.» Mais ce travail mobilise deux personnes, tandis que le robot l’exécute sans présence humaine.

 

Se libérer tout ou partie du binage pour se consacrer mieux aux cultures, voilà qui tenterait bien le maraicher. Ce deuxième test dans les haricots réserve quelques difficultés. Lâché entre deux rangs, le robot bine et «scalpe» bien les mauvaises herbes, mais sans butter le pied des haricots. «Il suffit de modifier la position des brosses.» L’engin est en effet muni de peignes en plus des socs. Une fois correctement disposés, ces auxiliaires déplacent vers le rang la terre soulevée en formant une petite butte. Le problème réglé, un autre survient aussitôt.

 

 

 

 

Le robot s’enlise dans des creux, ce qui le contraint à s’arrêter, à lever son outil puis à poursuivre son travail plus loin… quand il parvient à s’extraire de la zone critique. La parcelle a été creusée par les binages précédents laissant entre les rangs un  terrain fort irrégulier. Derrière le robot, l’inter-rang se retrouve parfaitement nivelé. Ce problème ne devrait donc plus se poser lors des passages ultérieurs. Celui-là non plus: le robot stoppe dès qu’il se trouve nez à nez avec une repousse de pomme de terre. La faute au faisceau laser qui balaye l’avant du robot au ras du sol.

 

Ce système de repérage des obstacles et des rangs est le seul opérationnel pour l’instant. Deux caméras situées en tête et en hauteur devraient éviter au robot de prendre une fane de patate pour un mur. «Nous attendons la mise à jour du logiciel pour les mettre en fonction » explique Frédéric Lacoste. De même la télécommande possède le défaut de se déconnecter très souvent. Problème énervant mais pas insurmontable. Nonobstant ces contrariétés, le robot s’acquitte très correctement de sa tâche. 

 

Assistant de cueillette

Cédric souhaite poursuivre les tests avant de prendre une décision. L’acquisition d’un robot lui semblerait assez rentable : « Il coûte 21000 euros. Ce n’est pas rien mais employer quatre saisonniers à temps plein pendant deux mois juste pour désherber nous coûte douze mille euros par an. » Le robot pourrait biner plus souvent, tous les quatre ou cinq jours. 

 

«On pourrait le faire travailler de 5h30 matin à 20 heures en saison. » A ce rythme, un seul pourrait se charger de désherber un tiers de la surface environ estime le maraîcher. Plutôt que de le laisser au garage, il pourrait aussi se montrer utile l’hiver pendant les cueillettes, comme assistant porteur de légumes. «Pour porter les courgettes à ma place par exemple. Il peut transporter jusqu’à 70 kilos ».

 

 

Quant à la main d’oeuvre, elle serait occupée à autre chose : «Notre objectif étant d’augmenter la surface sous abris, on aura demain davantage de besoins en hiver. »

 

Dominique Martin

 

 

Le robot Oz en démonstration

 

 

 

L'exploitation

Société en noms collectifs à trois associés :

  • Jean-Luc Chapeau
  • Céline Chapeau
  • Cédric Chapeau

Productions

Productions végétales

  • Maraîchage biologique : 120 légumes environs sur l’année, vente aux amap, magasins, à la ferme et sur Rungis

Surfaces

27 hectares dont

  • 10 ha en maraichage de plein champ
  • 8000 m² d’abris non chauffés

Dates clés

  • 1979 : installation en maraichage bio de Jean-Luc Chapeau.
  • 2001 : création du gaec et installation de Cédric
  • 2008 : installation de Céline